11 juillet 2025

Fernand Maillard, réviseur d’entreprises

 

En complément de la chronique relative à la conservation des archives, parue le 26 juin 2025, il est important de souligner un élément concernant le délai de sept ans lors de la clôture des liquidations de personnes morales. L’avis de la Commission des Normes Comptables n° 2011/21 du 5 octobre 2011 sur « La conservation des livres et des pièces justificatives » dit ceci :

« L'article 6, alinéa 4, de la loi du 17 juillet 1975 (ci-après : la Loi comptable) dispose, entre autres, que les pièces justificatives doivent être conservées, en original ou en copie, durant sept ans. Ce délai est réduit à trois ans pour les pièces qui ne sont pas appelées à faire preuve à l'égard de tiers.  

L’article 8, § 2 de la Loi comptable prévoit que les livres légaux doivent être conservés pendant sept ans à partir du premier janvier de l'année qui suit la clôture de l’exercice en cause.

En cas de liquidation d’une société, la Commission est toutefois d’avis que le délai de conservation des livres et des pièces justificatives peut être réduit à cinq ans. En effet, l’article 195 C.Soc. prévoit que les livres et documents sociaux doivent être conservés pendant cinq ans à partir de la publication de la clôture de la liquidation. La clôture de la liquidation implique la disparition de la personne morale et de son patrimoine1. La Loi comptable n’étant applicable qu’aux personnes morales existantes, le délai de conservation de sept ans n’est, à partir de ce moment, plus applicable.  

La Commission tient en outre à souligner que l’article 6, alinéa 4 ainsi que l’article 195 C.Soc. imposent uniquement une obligation minimale en matière du délai de conservation des pièces justificatives. Elle n'enlève rien à la possibilité, pour les entreprises, de développer une politique d'archivage appropriée.  

Il appartient donc à chaque entreprise de décider de conserver les pièces justificatives en question au‐delà du délai légal de conservation, compte tenu de leur importance particulière en cas de litige ou d'autres procédures. »

Le texte du Code des sociétés et des associations (« CSA ») dit bien en son article 2:102, § 1er et § 2, 4° pour les sociétés et 2:136 pour les associations[1], qu’il faut publier « l'indication de l'endroit désigné par l'assemblée générale de la société / de l'ASBL ou de l'assemblée de l'organe désigné dans les statuts de l'AISBL, où les livres et documents sociaux sont déposés et seront conservés pendant cinq ans au moins ».

Que faut-il en penser ? Pas de délai de sept ans et réduction à cinq ans ? Même si, en cas de clôture de liquidation, le délai de prescription contre les administrateurs et liquidateurs (sociétés : art. 2:143 §1er, al.2 CSA / associations et fondations : art. 2:143 §2, al.2 CSA) est de cinq ans, on peut se dire que les archives de la personne morale pourraient servir en diverses matières (droit fiscal, droit social, subsides, code civil (droit de propriété), etc.), même en l’absence de recours possible contre les anciens gestionnaires. Comme le dit la CNC, cela n'enlève rien à la possibilité, pour les entreprises, de développer une politique d'archivage appropriée.  

Et puis n’oublions pas ce qui a déjà été dit dans les chroniques précédentes : tout jeter au terme du délai de conservation … ou penser à conserver le patrimoine, l’histoire de l’entreprise : pour ce qui ne concerne pas des archives à données confidentielles ou soumises à des limitations de consultation ou de conservation (pensons au RGPD), pourquoi ne pas penser au dépôt aux Archives du Royaume ou ailleurs ?

Pour la petite histoire, on notera qu’en matière d’archives des associations et fondations, l’ancienne loi du 27 juin 1921 stipulait simplement pour les ASBL (art. 25) et les fondations (art. 41) que « L'affectation de l'actif ne peut préjudicier aux droits des créanciers. L'action des créanciers est prescrite par cinq ans à partir de la publication de la décision relative à l'affectation de l'actif. ». En revanche, la loi était muette pour les AISBL. On ne parlait pas de délai spécial de conservation des archives ; il fallait se référer au droit comptable. 

On notera par ailleurs qu’il faudra donner « l'indication des mesures prises en vue de la consignation des sommes et valeurs revenant aux créanciers et dont la remise n'aurait pu leur être faite » : c’est l’occasion de rappeler que dans ce cas la Caisse des dépôts et consignations est l’endroit idéal pour ce genre de consignation ; ces sommes et valeurs ne peuvent être prises en bénéfice, ou, à défaut, au bout du délai de prescription, sont à distribuer en fonction de ce qui a été prévu lors de la clôture de la liquidation de la personne morale.

 


[1] Par contre pour les fondations, le CSA est muet : il stipule simplement que le tribunal prononce la clôture de la liquidation).