5 décembre 2025

Clément De Bruyn, junior advisor doctrine IRE

 

La directive Stop the clock  

La directive européenne 2025/794 dite Stop the clock a été adoptée en avril 2025 par les Institutions européennes afin de reporter l’entrée en vigueur des obligations découlant de la CSRD. L’Institut avait, à cette occasion, publié un communiqué de presse et une factsheet mettant en avant les conséquences concrètes pour les entreprises concernées par la CSRD. 

Rappelons simplement, que la directive retardant le reporting en matière de durabilité prévoit d’étendre de deux ans le délai dans lequel les entreprises tombant sous le champ d’application de la réforme devront publier leur rapport de durabilité. Il est cependant important de noter que la directive Stop the clock n’a eu aucun impact sur les entreprises devant publier un rapport de durabilité en 2025 pour l’exercice financier 2024.  

La transposition en droit belge 

À l’instar des autres États membres, la Belgique est tenue de transposer cette directive dans son droit national, et ce pour le 31 décembre 2025. Les autorités belges ont ainsi entamé le processus législatif en vue d’intégrer les dispositions de la directive Stop the clock  dans la législation en vigueur.  

Le projet de loi a été examiné en première lecture le 8 octobre 2025 au sein de la Commission des Affaires économiques de la Chambre des Représentants, qui ensuite a adopté le projet lors de la seconde lecture le 12 novembre 2025. Enfin, la Chambre, réunie en séance plénière le 4 décembre 2025, a adopté à la majorité le projet de loi, qui entrera en vigueur le jour de sa publication au Moniteur belge.   

Le texte adopté précise les conditions d’application de la suspension des délais de reporting de durabilité prévus par la CSRD via la modification de l’article 116 de la loi du 2 décembre 2024. Il ne vise pas à transposer l’article 2 de la directive Stop the clock relatif au report de l’entrée en vigueur de la CS3D car cette dernière n’est pas encore transposée en droit belge.  

Cette nouvelle loi permet d’assurer la sécurité juridique et la continuité des activités économiques dans la période d’incertitude économique que le monde traverse. Les entreprises ont désormais plus de temps pour se préparer à publier leur rapport de durabilité et se mettre en conformité avec la législation en vigueur et à venir. Il est essentiel de rappeler que les réviseurs d’entreprises sont des partenaires privilégiés pour aider ces entreprises dans leurs démarches.  

Soulignons que la loi de transposition adoptée par la Chambre des représentants constitue une copie conforme du texte européen. Cette fidélité à la directive vise à garantir une harmonisation maximale et à limiter toute divergence d’interprétation ou d’application. 

Le tableau ci-dessous synthétise les changements induits par la directive Stop the clock et a fortiori par la loi :  

Vague

Loi CSRD 2024

Directive Stop the clock (2025) 

Loi modifiant la loi du 2 décembre 2024 

1ère vague 

Les grandes EIP, ainsi que les entreprises mères qui sont des grandes entités d’intérêt public, comptant plus de 500 salariés ont dû pour la première fois en 2025, publier des informations relatives à l’exercice 2024 conformément à la CSRD. 

N/A

Idem (partir des exercices sociaux commençant le 1er janvier 2024 ou à une date ultérieure en 2024).

2ème vague 

Les autres grandes entreprises (les grandes entreprises qui ne sont pas des EIP et qui comptent plus de 500 salariés et les grandes entreprises comptant moins de 500 salariés) auraient dû publier, en 2026, des informations relatives à l’exercice 2025. 

La directive Stop the clock détermine que les Etats membres reportent via leur législation nationale de deux ans l’entrée en application des obligations de publication d’informations auxquelles seront soumises les entreprises de la deuxième vague.

Exercice commençant le 1er janvier 2027 ou ultérieurement (publication 2028).

3ème vague

Les PME cotées, les établissements de crédit de petite taille et non complexes et les entreprises captives d’assurance et de réassurance auraient dû publier, en 2027, des informations relatives à l’exercice 2026. 

La directive Stop the clock détermine que les Etats membres reportent via leur législation nationale de deux ans l’entrée en application des obligations de publication d’informations auxquelles seront soumises les entreprises de la troisième vague.

Exercice commençant le 1er janvier 2028 ou ultérieurement en 2028 (publication 2029). 

4ème vague 

Certaines entreprises de pays tiers qui exercent des activités sur le territoire de l’Union européenne au-delà de certains seuils devraient publier, en 2029, des informations relatives à l’exercice 2028.

Pas de report prévu par la directive Stop the clock.

Idem (à partir des exercices sociaux commençant au 1er janvier 2028 ou ultérieur).

Le report des deuxième et troisième vagues vise à éviter que certaines entreprises soient tenues de publier des informations relatives aux exercices 2025 (deuxième vague) ou 2026 (troisième vague) et qu’elles soient ensuite dispensées de cette obligation. Cette situation entraînerait des coûts. 

Perspectives 

Le projet de directive Omnibus visant à modifier le contenu de la CSRD et le reporting de durabilité est encore en cours de négociations au sein des Institutions européennes. En effet, le 18 novembre dernier, la Commission, le Parlement et le Conseil ont entamé la procédure de dite de « trilogue » afin de parvenir à concilier leurs positions respectives. Les parlementaires européens ont, en effet, rejeté par un vote les propositions de refonte de la CSRD, telles que formulées par la Commission et le Conseil. Les discussions en trilogue devraient reprendre entre le 4 et le 8 décembre prochain avec l’espoir d’aboutir à un accord pour la fin 2025, en sachant qu’un vote sur le projet de directive est prévu le 16 décembre 2025, lors de la prochaine séance plénière du Parlement européen

Pour rappels, les discussions en cours portent également sur la modification du champ d’application de la CS3D et des obligations prévues par cette directive.  

Conclusion 

L’imbroglio autour des discussions relatives au package omnibus semble trouver une fin. Peut-on qualifier cette fin d’heureuse ? Cela dépend du point de vue selon lequel on se place. En effet, cela met fin à une période d’insécurité juridique qui représentait un risque pour les entreprises. Cela démontre également que le dialogue au sein des Institutions européennes n’est pas mort, ce qui est important dans le contexte politique actuel. Cependant, si l’on se place du coté de la transition écologique, ce ralentissement des exigences de reporting n’est pas une bonne nouvelle puisqu’il contribue à un affaiblissement du Green deal qui vise pourtant la réduction des émissions de CO2 d’au moins 55% d’ici la fin 2030.   

L’Institut des réviseurs d’entreprises suit l’évolution de près et ne manquera pas d’informer ses membres en cas d’avancée significative.